Les récits de prisonniers sont en littérature presque un genre en soi. La plupart sont des descriptions des lieux, des sentiments et des émotions du prisonnier et des conditions de la détention. Essentiellement, ce sont des documents a posteriori ; ils racontent un monde antérieur. Les lettres de Carlo Levi tout en respectant ces usages sont d’une autre nature et d’une nature complexe.
Ces « lettres de prison » que Carlo Levi écrivit sur le papier réglementaire qu’une administration tatillonne concédait au prisonnier, un papier rigoureusement ligné, délimité et encadré et surveillé de près par les censeurs. La place pour écrire était comptée et la parcimonie frappait également la fréquence des courriers : une fois par semaine et pas plus. Sans oublier le train de tortillard que lui donnaient les stations obligées des contrôles de police – dans son cas, politique. Cette correspondance intime était secrètement publique.
En plus, c’était le seul moyen de communiquer avec l’extérieur et le passage obligé des requêtes domestiques : vêtements, sous-vêtements, chaussettes, chaussures, pantoufles, savon, dentifrice, livres, des nouvelles basiques concernant la santé, des salutations et l’expression des affections. Bons baisers à tous.
Tous ceux qui ont connaissance du fonctionnement carcéral savent ces choses.
Il y a dans la correspondance de Carlo Levi – on n’a pas ici trace des réponses, un autre mouvement qui se dessine : une articulation de résistance. Ses missives parlent d’autre chose et s’adressent également à d’autres personnes sans le dire ouvertement. Elles parlent de peinture, de ses tableaux, de ses expositions, de son lancinant désir de peindre ; elles parlent de livres, de littérature, de philosophie, d’art, d’esthétique ; de tout, sauf de politique ou si elles le font, c’est pour nier tout intérêt à ce sujet ou pour dénier toute implication. Il s’agit de donner le change au lecteur caché, à l’agent du régime fasciste.
Le reste est dit, dans les dialogues maïeutiques qui introduisent chacune de ces 42 lettres – publiées par l’éditeur italien « il melangolo » en 1991 sous le titre « È questo il « carcer tetro » ? Lettere dal carcere 1934-1935 », qui ont été d’abord traduites d’italien en français par mes soins. Ensuite, sur la base de cette traduction, je les ai métamorphosées en chansons.
Marco Valdo M.I.
Auteur : |
Marco Valdo M.I. |
Catégorie : |
Poésie |
Format : |
A5 (14,8 x 21 cm) |
Nombre de pages : |
264 |
Couverture : |
Souple |
Reliure : |
Dos carré collé |
Finition : |
Brillant |
ISBN : |
978-2-8083-1250-9 |