Sais-tu, Petit Bossu, que les poètes dansent avec les mots. Ils sont des porteurs de lanternes. Ils ont besoin de parler. Ici. Là-bas. Dedans, dehors. Ils se nourrissent de ton sang, tels des vampires. Mais ils se promènent partout. Dans les villes comme dans les champs. Ainsi, ils comblent le vide de leur existence. Avec eux, le langage est magnifié. Le poète est un homme de la lisière obscure. Oseras-tu, Petit Bossu de la Lune, t’aventurer dans mon bois ? Aussi touffu soit-il ? Palper ce poème qui vient des tripes et te vautrer dans mes excréments ? Pourtant, le poème est la caresse de chaque soir, la communion où deux paroles se rencontrent. On y sent la ravageuse beauté, la fureur légitime, mais aimante du poète. Parfois, il est acte de révolte, une révolution, un affrontement. Il est la bande passante de la sensibilité et de l’audace, mais aussi un sublime bric-à-brac de mots, une brasse dans les signes, une respiration où le nageur se sublime. Non, André et Alice, ce n’est pas de la fausse monnaie linguistique. C’est également le cri des cancéreux, la poésie en phase terminale, en soins palliatifs. Pour moi la poésie a des vertus thérapeutiques. Elle entraine mes balbutiements parfois glauques et m’amène vers un nettoyage spirituel. Je crée des rythmes puis des lenteurs. Ce sont des incantations, des prières que je me lance à moimême. J’implore parfois mon bouclier moral pour faire taire mes envies de blasphèmes. Alors, ma poésie devient inaudible dans cette société surmédiatisée où je n’ai aucun statut. Le poète ne serait-il qu’une figure morte ? Notre piano mécanique joue encore, mais les hourras de tantôt se sont transformés en gémissements tentaculaires.
Soudain, un poivrot proclame qu’à Paris, on a mis des pianos dans les gares, les mairies, les usines, les prisons. Et si le monde se mettait à chanter, Petit Bossu, si on se cotisait pour peupler le désert de pianos mécaniques.4 Pour la femme syrienne, traversons la démocratie à la nage. Faisons-lui connaitre le fado portugais, les valses de Vienne, le tango, la farandole du Grand Jojo. Faisons-lui apprécier Brel et Brassens. Et pourquoi pas Ferré ? Lisons-lui Baudelaire et le divin Marquis. Et pourquoi pas Breton et puis Lautréamont. La Peste de Camus ? La Nausée de Sartre ? Les Limbes du Pacifique ? Nous serons tous son Vendredi !
Auteur : |
Luc Libon |
Catégorie : |
Poésie |
Format : |
A5 (14,8 x 21 cm) |
Nombre de pages : |
104 |
Couverture : |
Souple |
Reliure : |
Dos carré collé |
Finition : |
Brillant |
ISBN : |
978-2-8083-1557-9 |