Le médecin spécialiste est venu me voir, avec deux assistants, pour m'expliquer que si je ne me soignais pas, je pouvais mourir en quelques semaines ou quelques mois. Puisque je ne voulais pas mourir, je devais me soigner. Ce qui signifiait que j'allais devoir être hospitalisée le soir même en chambre stérile. Que je ne pourrais pas voir ma fille pendant quatre ou six semaines. Que je ne pouvais plus l'allaiter. J'ai crié, j'ai pleuré, je n'y croyais pas.
Ça ne pouvait pas être en train de m'arriver. Pas à moi.
Je devais lâcher prise.
Laisser ma fille sans moi pendant quatre longues semaines, ou plus. Sans mon odeur, sans mon sein, sans mon or blanc. Je lui disais, dans ma tête, « Ma douce, sais-tu que je ne pars pas pour toujours ? » Mais comment pouvais-je le lui promettre ? Je ne voulais pas mourir, je ne pouvais pas mourir, mais je n'en étais pas sûre. J'en avais si peur. À ce moment, j’ai réalisé que toutes les peurs qui me semblaient jusqu’alors insurmontables n'étaient rien par rapport à la peur de mourir, là, à 28 ans. Rien.
On descend, là, tout en bas. On lâche tout. On hurle. On a envie d'abandonner. Qu'est-ce que c'est dur, quand on est tombé si bas, de pousser sur les bras, et de remonter. D'arrêter les larmes et de sourire. C'est dur, tous les jours. Mais là-haut il y a du soleil parfois.
Il y a Nina qui court à la plage, qui joue avec le sable. Il y a Nina qui rit, qui crie, qui m'appelle.
Il y a cette raison, trop grande, de ne pas rester si bas.
Et voilà que la maladie m'a obligée à me mettre à nu, à m'accepter comme je suis. Sans filtre aucun, sans cheveux pour me cacher, sans maquillage pour me déguiser. C'est dur parfois, de ne plus avoir de carapace. Tel un escargot sans sa coquille.
Depuis la découverte de la maladie, je ne me sens plus la même. De moins en moins.
D'abord suite à la séparation avec Nina. Puis l'administration de la chimiothérapie. La perte des cheveux. Le gonflement dû aux médicaments. La faiblesse. Les nombreux symptômes déplaisants et mes émotions contrastées.
Plus le temps passe et plus j'ai du mal à me reconnaître. Je ne suis plus la même que sur les photos d'il y a quelques mois.
Je me sens parfois errer, parfois couler.
Je me sens heureuse aussi. Par moments confuse et malheureuse. Je me sens bousculée d'un côté à l'autre entre bonheur et désespoir, entre plénitude et vide. J'ai du mal à tenir le coup. Certes, cela ne se voit pas derrière mon sourire.
Il y a la faiblesse visible, mais aussi la douleur invisible.
Eh oui… je ne serai plus jamais la même, mais l’aurais-je été si mon corps n'avait pas dysfonctionné ?
Auteur : |
Micaela Ortu |
Catégorie : |
Biographies, Mémoires - Autobiographies |
Format : |
A5 (14,8 x 21 cm) |
Nombre de pages : |
156 |
Couverture : |
Souple |
Reliure : |
Dos carré collé |
Finition : |
Brillant |
ISBN : |
978-2-8083-2891-3 9782808328913 |