Le Livre en papier • En marche vers la terre de Kena'an de Pierre Dessy

Celles et ceux qui sont allés « marcher » en Terre de Palestine reviennent aux chemins quotidiens avec, à l’esprit et au cœur, une brassée de sensations diverses. S’ils tentent au retour de nous « donner à voir » ce qu’ils ont vécu, leur récit agence de façon forcément singulière les images, impressions, émotions ou réflexions liées aux rencontres et aux paysages.
L’auteur des pages qui suivent fait partie de ces pèlerins qui pérégrinent les yeux grands ouverts, tous sens aux aguets. Sa longue présence auprès de jeunes souvent blessés par la vie, sa passion de croyant pour les textes bibliques inlassablement ruminés, l’ont conduit une fois encore à croiser divers « regards » pour tenter de comprendre et de donner sens.
Il ne pouvait, dès lors et à son tour, nous livrer de son périple qu’un très personnel récit de voyage. Ses carnets de route nous invitent aux va-et-vient incessants d’un dialogue entre la geste ancienne de peuples antagonistes et leur douloureuse actualité ; à scruter à sa suite la symbolique de ces lieux mythiques pour éclairer notre propre aventure d’apparence si souvent banale ; à l’inscrire ainsi dans une dynamique séculaire pour nous donner de vivre plus intensément nos histoires saintes.
Les clés de compréhension qu’il nous suggère ne sont donc pas que théorie gratuite. Elles redonnent aux vieux textes qui nous hantent, leur fraîcheur et leur pertinence pour décrypter ce qui advient à notre monde, pour assumer et traverser plus lucidement nos impasses et nos violences individuelles ou collectives.
Ne viens donc pas chercher ici, ami lecteur, les chromos aguichants d’un énième guide touristique. Voici plutôt la narration vagabonde d’un homme de son temps qui arpente son héritage avec patience, qui tisse avec l’intelligence du cœur mille liens, à l’affût de résonances inattendues. Il s’émerveille ou s'en-colère, c’est selon. Toujours il ouvre des pistes. Puisses-tu donc accueillir ces pages comme une invite fraternelle à entrer en dialogue avec tes propres souvenirs peut-être, avec tes indignations ou tes lenteurs sans doute, avec celles et ceux qui là-bas et ici souffrent de violence et luttent d’espérance.
Merci à toi, Pierre, d’avoir « dépoussiéré » de la sorte ces lieux de haute mémoire, ces personnages si vulnérables avant que d’être vénérables à nos yeux. De nous les avoir redonnés hommes et femmes de chair et de sang en chacun de tes « arrêts sur image » parfois si déroutants de nouveauté.
Merci encore de nous reconduire ainsi au plus intime de nous, à nos relations tant de fois essayées, au vieux rêve obstiné de la réconciliation et de la paix en nous et entre nous. Il est promesse à accomplir par-delà tous nos murs. Tes pages en redisent l’urgence et en balisent les sentes pour les nomades que nous sommes.